Ce mardi 11 février, une réunion de crise a eu lieu à l’Elysée. Pour remobiliser les députés, qui se sentent abandonnés, Emmanuel Macron les a conviés dans l’antre du pouvoir. Devant les parlementaires, le président de la République a décidé de s’expliquer… en s’attaquant (une nouvelle fois) à François Hollande.
Eviter à tout prix une nouvelle rébellion. Après plus de mille jours passés à l’Elysée, Emmanuel Macron traverse une crise sans précédent. Déjà mis sous tension par la population depuis de longs mois, le président de la République voit ses rangs s’effriter petit à petit. A l’approche des élections municipales et de l’examen de la polémique réforme des retraites, le chef de l’Etat a lancé une opération reconquête. Alors que les députés de la majorité – déçus et inquiétés par Emmanuel Macron – ont déjà rencontré Edouard Philippe la semaine dernière en réunion de crise, ils ont cette fois-ci été reçus par le président. Ce mardi 11 février en effet, il les avait invités à l’Elysée pour arrêter l’hémorragie et remobiliser les troupes. L’occasion pour lui de tirer le bilan de son exercice du pouvoir. « Nous sommes dans un moment difficile de la vie nationale et parlementaire, a-t-il avoué, comme le rapporte Le Parisien. Mais on est embarqué dans une aventure commune quels que soient les choix des uns et des autres. »
Mais face aux députés, Emmanuel Macron a surtout parlé du passé et des erreurs de son prédécesseur. « J’ai vu le quinquennat précédent se disloquer sur des initiatives personnelles. Les gens qui faisaient les plateaux sur BFM en solitaire n’ont jamais été réélus », a lancé le chef de l’Etat. Une allusion à peine voilée à son passage dans le gouvernement de Manuel Valls et surtout, sur son départ de Bercy vécu par l’exécutif alors en place comme une trahison. « Mon parcours personnel ne plaide pas pour le caporalisme ! », a-t-il même plaisanté. Lui, qui demande aujourd’hui à ses députés de ne pas quitter le navire même en pleine tempête, ne veut donc pas d’un nouveau rebelle mais cherche des bons petits soldats. En somme, Emmanuel Macron a peur de se retrouver face à un Emmanuel Macron, prêt à planter des couteaux dans le dos de ses alliés pour le bien de son avenir personnel. Quatre ans après, il n’a rien oublié. Peut-être dans ses rangs sent-il le vent de la trahison qui flottait au ministère de l’Economie en 2016…
Emmanuel Macron ne veut pas être une victime
A l’époque fidèle de François Hollande – lui qui avait offert au jeune énarque politiquement inexpérimenté qu’il était un poste de conseiller avant de le propulser à Bercy – Emmanuel Macron n’avait pas tergiversé bien longtemps avant de quitter avec fracas sa position pour créer son parti et, par la même occasion, couper l’herbe sous le pied du président sortant avant l’élection. Avant de prendre son envol, l’actuel chef de l’Etat lui aussi avait été déçu par les décision de l’exécutif. Agacé par l’inaction de François Hollande, il était aussi en colère contre Manuel Valls. Le Premier ministre, faisant fi de ses mois de travail, n’avait pas hésité à faire passer sa loi pour la croissance et l’activité en lui imposant le 49.3. A l’époque, le chef du gouvernement sentait déjà que le jeune ministre pouvait lui disputer quelques parts de marché. Se sentant trahi, Emmanuel Macron avait donc préféré lui rendre la pareille. De quoi rendre fou de rage Manuel Valls, qui après le renoncement de François Hollande, lançait une pique assassine à son ex-ministre : « La réussite ne se mesure pas au montant du compte en banque, elle se mesure à la lumière que l’on a dans les yeux ».
Aujourd’hui installé en haut de la pyramide politique, Emmanuel Macron n’a en rien oublié les différentes mésententes qui auguraient sa démission. En pleine tempête, il a donc peur de se retrouver dans la position inconfortable dans laquelle il avait lui-même placé François Hollande. Bien avant de démissionner, le chef de l’Etat ne se faisait pas prier pour critiquer ouvertement la politique qu’il était pourtant censé défendre. Déchéance de nationalité, réforme du marché du travail… autant de sujet sur lesquels Emmanuel Macron n’emboîtait pas le pas de son président et son Premier ministre. Tout comme certains de ses ministres ou députés aujourd’hui. Lui, aujourd’hui bien plus proche de Nicolas Sarkozy que de François Hollande, ne peut pas oublier ce qu’il a lui-même fomenté. Et les paroles de son prédécesseur résonnent : « S’il y a une victime, la première, c’est moi et j’en ai payé suffisamment le prix, y compris en n’étant pas candidat à l’élection ». A un peu plus de deux ans de la prochaine présidentielle, Emmanuel Macron n’entend pas être la « victime » des ambitions des siens.
Crédits photos : Jacques Witt/Pool/Bestimage
Source: Lire L’Article Complet