- Docteur en neurosciences, il était parti pour une belle carrière en blouse blanche… jusqu’à ce que Pierre-Hugues José ne décide de se lancer dans le rap, en 2020.
- « Du jour au lendemain, je suis passé de docteur à rappeur-chômeur », image l’artiste, qui commence doucement à se faire connaître et enchaîne les dates.
- Il est aussi très suivi sur les réseaux sociaux, où il réalise des sketchs humoristiques. Toujours avec un style bien à lui et un fort accent franc-comtois.
« J’ai deux masters, un doctorat, plus diplômé que le chef de l’Etat. » Pierre-Hugues José exagère à peine quand il se présente dans un de ses titres. A 34 ans, le rappeur possède un profil vraiment atypique dans son milieu. Celui d’un ex-brillant élève qui a tout plaqué en 2020 pour explorer sa passion pour la musique.
« Rester en blouse blanche avec des rats, ça me rendait triste », sourit le natif de Besançon (Doubs), qui a grandi dans un « village de Haute-Saône pas loin de Vesoul ». Sa ville, celle qu’il cite à tout bout de champ et à qui il a consacré une chanson, « parce que j’y ai tout fait de 15 à 20 ans. » Comme son lycée donc, avant d’enchaîner ailleurs sur une licence en physique et notamment un master « en traitement du signal et des images ».
« Les maths, la physique et la bio, j’aimais ça et j’étais bon sans trop bosser. Je me suis dit qu’il fallait être rentable alors j’ai fait des études là-dedans », rembobine-t-il. « Puis après, il y avait un sujet de thèse qui me plaisait bien à Bordeaux. Je suis allé la faire là-bas. » Le résultat, un document de 90 pages, est toujours accessible en ligne. Son titre ? « Modifications métaboliques lors de l’activation cérébrale : suivi par spectroscopie de résonance magnétique nucléaire du proton et du carbone 13 ». Heureusement, ses textes sont aujourd’hui plus accessibles au grand public que l’intitulé de sa thèse.
A l’époque, l’auteur s’appelait encore Jordy Blanc. « PHJ »* n’était pas encore né, même si la musique l’attirait déjà. Le rap bien sûr avec Sniper comme premières écoutes, puis Orelsan, Disiz, Vald mais pas que. « J’écrivais pas mal de poésies et j’étais fan de chansons françaises. J’avais même sorti deux petits albums que j’avais distribués dans le coin… Mais ça date, je devais avoir 16-18 ans ! », rigole-t-il avec son accent franc-comtois prononcé. Forcé ? Dans certains titres oui mais au téléphone aussi, le trentenaire ne peut le masquer. « Je l’avais peut-être un peu perdu quand je vivais loin de ma région natale mais il s’est réinstallé… Je l’ai c’est sûr ! Je me créerais vraiment un personnage si je le cachais. »
« Je suis passé de docteur à rappeur-chômeur »
L’artiste, qui réalise aussi de nombreux sketchs, en a quand même fait sa marque de fabrique depuis début 2020, l’année où il a tourné le dos à une carrière toute tracée dans les neurosciences pour se lancer dans le rap. Pas sur un coup de tête. « Avant, je n’avais pas eu les c. Sûrement par respect pour mes parents qui sont ouvriers. Dans ce monde-là, on bosse, on ne fait pas son petit prince. J’ai fait le taf pour prouver que la musique n’était pas une lubie, que mon choix n’était pas un caprice. »
Le pari était osé et Pierre-Hugues José l’a doucement relevé, depuis sa chambre d’enfant chez ses parents. « Du jour au lendemain, je suis passé de docteur à rappeur-chômeur », image-t-il, lui a d’abord tenté « pas mal de freestyles d’une minute » sur YouTube et autres réseaux sociaux. Mais c’est avec ses cinq « comptines RAP » qu’il a commencé à percer. Soit des réadaptations, avec un vocabulaire fleuri, de classiques enfantins. Où « Promenons-nous dans les bois » devient « C’est trop bien Pôle emploi » et « Dodo, l’enfant do » se transforme en « 1, 2, 3 bédos »…
Son premier titre « Méchant », consacré aux violences domestiques et clippé depuis, est ensuite venu lui ouvrir des portes supplémentaires. Loin des canaux numériques jusque-là utilisés. « Un manager m’a repéré et m’a aidé à trouver une tourneuse. J’ai été sélectionné pour la scène des Inouïs, à Bourges en avril 2022 et après, ça a déroulé. » Un peu partout en France pour une trentaine de concerts au total, avant les prochains prévus à Romans-sur-Isère, Dijon et Bourgoin-Jallieu.
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A chaque fois, le rappeur y propose son style à part. Energique, très chevelu avec sa touffe bouclée, souvent habillé d’un maillot de sport dont celui de son club de cœur, le FC Sochaux-Montbéliard… Et surtout armé d’un registre de langue bien à lui. Avec « l’accent cul-terreux » comme il le clame dans « Bouyave ». Un rap « made in campagne » en opposition à celui issu des banlieues ? « PHJ » ne le revendique pas mais se plaît à parler de cette « France d’en bas » des « bouseux » dont il vient et se sent proche. « Oui mais je ne suis pas hermétique à découvrir d’autres choses, ce qui est souvent le cas », précise-t-il. « Quand je fréquentais des personnes de milieux plus aisés, je sentais bien qu’ils nous voyaient comme ça. Mais c’est aussi de notre faute car on se ferme souvent et c’est comme ça qu’on est pris pour des cons. »
Bientôt trois singles
Lui souhaite naviguer entre les mondes pour continuer à attirer un public divers. Avec les cinq titres de son premier EP avant les trois prochains singles « en octobre, novembre et décembre ». Mais aussi avec ses sketchs visibles sur TikTok (560.000 abonnés), Instagram (260.000) ou Facebook (180.000). Pierre-Hugues José s’y met souvent en scène en train de dialoguer avec sa « délicieuse », sa compagne. Pour un humour toujours bon enfant quoique souvent graveleux. Là encore, le trentenaire ne se retient jamais pour sortir quelques expressions osées. Exemple ? « Elle tarbeule dans le pieu » ou « J’dégaine le braquemart, j’la bouyave gars »…
« C’est sûr que ça va être compliqué de passer à la radio », rigole-t-il. « Mais je ne veux pas lisser, ce n’est vraiment pas la stratégie. Le jour où je le ferai, peut-être que je me renierai. » En attendant, le rappeur reconverti vit maintenant de sa passion en tant qu’artiste-indépendant. « Mais en sciences, ça aurait été plus simple de faire de la caillasse », rappelle le trentenaire sans exprimer le moindre regret. Il a pris un autre chemin. « J’mets Vesoul sur la carte, Vesoul sur la carte »…
Pourquoi « Pierre-Hugues José » ?
Il y avait peut-être plus simple et plus court à trouver comme nom de scène. Mais Pierre-Hugues José assume pleinement son choix de délaisser Jordy Blanc pour un triple prénom. « Jordy, ce n’était pas possible parce qu’il y a déjà le chanteur qui a fait « Dur d’être un bébé » et un rappeur, « Jorrdee ». Pierre-Hugues José, il n’y a que moi ! Même quand je crée une adresse mail, pas besoin d’ajouter des chiffres ! Pierre, c’est le frère de la femme de mon frère et Hugues son père. José, c’est pour le claviériste dans »Hélène et les garçons ». Et j’avais aussi un camarade autiste qui s’appelait Pierre-Hugues, c’est un hommage. »
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