La peintre Françoise Gilot, ex-compagne de Picasso, est décédée à 101 ans

Françoise Gilot, décédée ce mardi à 101 ans et qui a été la compagne de Pablo Picasso de 1946 à 1953, s’est imposée comme une peintre de renom après leur séparation, tirant définitivement un trait sur ce passé agité.

Un temps muse de Picasso, elle a été une artiste à part entière pendant plus de 60 ans. En juin 2021, l’une de ses peintures, Paloma à la Guitare (1965), s’était par exemple vendue pour 1,3 million de dollars lors d’enchères chez Sotheby’s. Elle faisait le lien entre l’école de Paris des années 1950 et la scène américaine, exposant ses peintures, dessins ou estampes dans de nombreux musées et collections privées, d’Europe et des Etats-Unis. Elle avait aussi illustré des livres d’Eluard ou Prévert.

Picasso, son héros

Évoquant ses sept années de vie commune avec le peintre, elle se comparait à Jeanne d’Arc : « Il fallait porter une armure du matin au soir, prouver sa force 24 h/24. Nous étions très mal assortis ». Devenue citoyenne américaine, elle ne s’était d’ailleurs pas rendue à ses obsèques en 1973.

Née le 26 novembre 1921 à Neuilly-sur-Seine (ouest de Paris) dans une famille bourgeoise, elle suit les traces de sa mère, une aquarelliste, pour s’orienter vers le dessin et la peinture. Brune, élancée, l’air réfléchi, elle a 22 ans quand elle rencontre Picasso, alors âgé de 61 ans et amant de Dora Maar. Il l’invite à venir voir son atelier en mai 1943 et lui fait une cour empressée. L’homme qui a peint Guernica est un héros pour elle. Elle le trouve par ailleurs courageux d’être resté à Paris alors qu’il aurait pu s’exiler aux Etats-Unis.

Peut-être davantage fascinée par son extraordinaire présence que véritablement amoureuse, Françoise Gilot le suit à Paris et à Vallauris, vivant avec lui à partir de 1946. Le couple a deux enfants, Claude (né en 1947) et Paloma (née en 1949). Durant leur vie commune, l’artiste la représente sous l’apparence de la « Femme fleur », radieuse, solaire, hautaine.

« Pas méchant mais cruel »

En 1953, elle décide de le quitter – une première parmi les compagnes de Picasso — et de reprendre sa peinture, optant pour un minimalisme de plus en plus coloré. Il lui faudra un sacré caractère pour se consacrer à sa propre œuvre quand Picasso n’aurait pu faire qu’une bouchée de ses prétentions artistiques.

En 1964, elle publie Vivre avec Picasso, un livre relativement intime sur sa vie avec l’artiste, qui rencontre un énorme succès (traduit en 16 langues, plus d’un million d’exemplaires vendus). Elle le dépeint comme un être tyrannique, superstitieux et égoïste. Pour elle, cette relation fut « un prélude à (sa) vie. Pas la vie ».

« Intellectuellement, dit-elle, nous nous entendions bien, humainement, c’était un enfer. Il n’était pas méchant mais cruel, c’était un sadisme masochiste. (…) A la fin, ma jeunesse lui devenait insupportable, et moi, je changeais aussi ».

L’entourage du peintre parle alors d’opportunisme et les amis de Picasso s’éloignent d’elle. Ce dernier tente de faire interdire l’ouvrage mais la justice refuse la saisie. Furieux, il cesse alors de voir ses enfants.

Fin de vie à New York

Françoise Gilot a aussi écrit un ouvrage sur les relations, pas simples, entre Matisse et Picasso (1991). Matisse qui, contrairement à Picasso, rendait heureux son entourage, l’appelait « Sainte Françoise ».

Elle a ensuite épousé le peintre Luc Simon, dont elle a eu une fille, Aurélia. En 1970, elle s’est mariée avec l’éminent docteur Jonas Salk, pionnier de la vaccination de la poliomyélite, avec qui elle vivra jusqu’à sa mort en 1995, en Californie.

Par-delà les vicissitudes de la vie, Françoise Gilot n’a jamais sacrifié son travail artistique qu’elle a poursuivi avec passion jusqu’au très grand âge. Elle a passé les dernières années de sa vie à New York.

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