Fait divers : le chat de la gare Montparnasse broyé par un train !

Entre bouleverser ses horaires ou laisser un pauvre animal se faire couper en deux par un TGV, la SNCF a vite tranché…

Georgina et sa fille qui ont perdu leur chat Neko, sous un train stationné en gare.

Gare Montparnasse, le 2 janvier. Georgina et sa fille s’apprêtent à prendre le train direction Bordeaux, avec Neko, leur chat, membre à part entière de la famille. Quand, soudain, c’est le drame. Le petit animal s’échappe de sa sacoche et se réfugie sous le train. Aussitôt, les deux femmes alertent les agents de la SNCF. Le chat est là, caché sous le wagon du TGV qui ne va pas tarder à partir. Elles les supplient d’intervenir pour sauver Neko. Rien n’y fait. L’heure, c’est l’heure, on ne remet pas en cause le planning pour un malheureux chat ! Des cris, des pleurs… le train s’ébranle. Lentement, la pauvre bête, l’amour de la vie de ces deux femmes, est hachée dans un dernier miaulement d’agonie. Qu’il nous soit permis au passage de souligner notre étonnement : on ignorait en effet que les chemins de fer français étaient autant à cheval sur la ponctualité, compte tenu du nombre de trains annulés ou arrivant régulièrement en retard, laissant des quais bondés d’usagers en plein désarroi ou en colère.

L’animal avait son ticket !

Mais revenons à la tragédie. Georgina et sa fille, qui ne sont pas du genre à se laisser faire, portent le scandale sur la place publique. Immédiatement, la Fondation 30 millions d’amis s’empare de l’affaire et dénonce par la voix de sa présidente Reha Hutin « un manque d’empathie aberrant », avant d’ajouter : « Au-delà de la cruauté abominable des faits, l’animal était en règle, puisque ses maîtresses s’étaient acquittées d’un billet pour qu’il puisse voyager en toute légalité. C’est donc un passager de la SNCF qui a été sciemment écrasé ! »

De son côté, Xavier Bacquet, avocat de la même fondation, accuse : « Des agents ont délibérément pris la décision de démarrer un train, alors que les maîtresses les ont informés de la présence de leur chat sur les rails. C’est donc en conscience que cette décision potentiellement mortelle, et qui l’a malheureusement été, a été prise… » Sans surprise, la Fondation Brigitte Bardot est intervenue elle aussi, déclarant qu’il était « étonnant que la SNCF ne s’inscrive pas dans le renforcement de la protection animale. » Sans surprise non plus, le journaliste Hugo Clément et le député Aymeric Caron, tous deux militants défenseurs de la cause animale, ne tardent pas à se mêler de l’affaire. Le premier s’indignant du « manque d’action de la SNCF » et le second, plus virulent, s’exprimant en ces termes : « Honte aux employés de la SNCF qui ont refusé d’attendre quelques minutes que ce chat ait été récupéré avant de faire redémarrer le train. Les cruautés sur animal de compagnie et, bien sûr, la mise à mort, sont interdites par la loi. Là, rien n’a été fait pour éviter le pire. »

La SNCF a présenté ses excuses en « regrettant ce triste incident ». Faute d’explications officielles, c’est sur Twitter qu’un cheminot connu sous le pseudonyme de @BB27000 fait valoir les arguments de son employeur : « La présence d’un animal ou d’un objet sur les voies, lorsqu’un train est stationné à quai, est relativement simple à résoudre dans une petite gare peu fréquentée. Mais tout se complique dans une gare à fort trafic, comme celle de Montparnasse où s’est produit l’accident. Il est impossible de bloquer une gare pour un chat. Sans compter que ses deux propriétaires auraient pris une sacrée amende, car on aurait stoppé plein de trains. »

Sans négliger le fait qu’en de telles circonstances, les procédures légales sont hautement chronophages : le conducteur du train est le seul maître à bord à pouvoir formuler « une demande de protection du personnel », en accord avec le poste d’aiguillage. La gare Montparnasse aurait été bloquée des heures durant, nous assure-t-on. Certainement, mais on aurait pu objecter que si le train n’avait pas démarré à l’heure prévue, c’eût été pour une juste cause.

Controverse

Certes les arguments de la SNCF méritent d’être entendus, mais on peut déplorer que la société nationale qui fait partie du service public assure sa communication officielle par le biais de l’un de ses internautes. Ce d’autant plus que les amis des animaux auront tôt fait de lui rétorquer que ces mêmes gares sont régulièrement bloquées par des grèves à répétition. Et ils n’auront pas non plus forcément tort, ces usagers, de rappeler le terrible bilan du chemin de fer français en matière d’accidents avec des animaux. Ainsi, plus de 1 200 trains percutent chaque année, vaches, sangliers, cerfs, ânes et autres biches sur leur trajet. Bien sûr, il faut border les voies de clôtures, comme cela se fait déjà sur les lignes TGV et RER de banlieue. Mais ces mêmes clôtures empêchent aussi la libre circulation des animaux dans la nature. La quadrature du cercle, en somme ! En attendant, ce sont nos amis les bêtes qui paient un lourd tribut de cette situation paradoxale, dans laquelle les voyageurs sont bien contents de faire un Paris-Strasbourg en 1 heure 46, mais ne supportent pas qu’une biche puisse être malheureusement percutée sur la voie lors du passage d’un train.

Quant aux infortunées Georgina et sa fille, ne seraient-elles pas en droit de demander à ce que des gens payés en partie par leurs impôts puissent faire preuve d’un minimum de compassion ? Car les animaux domestiques sont des mammifères comme nous et constituent souvent une part indispensable de nos vies. Et c’est un peu à la manière dont ils sont traités que l’on peut prendre le pouls d’une société. Considérée sous cet angle, la nôtre n’est pas très en forme…

Et aussi…

De nouveaux policiers pour protéger les animaux

Les chiffres se suivent et se ressemblent, en leur cortège grandissant de malheurs infligés à nos amis les animaux : plus de 30 % en cinq ans et 12 000 faits constatés chaque année ! Sans compter ceux qui ne font pas l’objet du moindre signalement… Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, tente aujourd’hui d’enrayer ce fléau, en créant une « division d’enquêteurs spécifiquement chargée de la maltraitance animale ». En déplacement dans un refuge de la SPA, il a annoncé l’arrivée de 4 000 référents « spécifiquement formés » dans les commissariats et gendarmeries, chargés de « prendre les plaintes et enquêter sur ces violences ». Leurs auteurs sont principalement des hommes (73 %) vivant en milieu rural. Chiens (46 %) et chats (24 %) sont les premiers concernés par cette sauvagerie. Hormis les violences envers ces bêtes innocentes, les abandons qui, s’ils ne représentent que 5 % des faits constatés, ont augmenté de 95 % depuis cinq ans. À cet horrifique bilan, ajoutons les mutilations de chevaux, à ce jour non élucidées. Sans oublier ces pauvres chiens dressés pour participer à des combats sauvages et souvent abandonnés ensuite, quand ils n’ont plus l’énergie nécessaire pour se produire dans d’aussi morbides spectacles, excitant ce qu’il y a de plus vil en l’être humain. C’est à se demander qui sont les véritables bêtes… ?

Nicolas GAUTHIER

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