Anny Duperey : "Tous les matins…", ce génie qu’elle a côtoyé chaque jour sur le tournage de Stavisky

En 1974, la comédienne tourne Stavisky (dimanche 11 septembre à 20 h 55 sur Arte), un film d’époque somptueux, aux côtés de Jean-Paul Belmondo. Elle nous livre ses souvenirs.

Quelle image de Stavisky vous revient toujours en premier ?

Anny Duperey : Mon premier souvenir fort de ce film se situe bien avant le tournage, au moment de la fabrication des costumes. Tous les matins, pendant deux mois, je suis allée chez Yves Saint Laurent et c’est lui-même qui a conçu tous les vêtements sur moi. Le tête-à-tête avec ce génie, c’était un rêve éveillé pour la petite-fille de couturière que j’étais. Et qui, en outre, créait souvent ses costumes de films elle-même.

C’est la première fois que vous étiez dirigée par Alain Resnais. Comment travaille-t-on avec un immense metteur en scène, doublé d’un homme réputé discret ?

J’ai adoré tourner avec lui. C’était le genre à donner très peu de consignes, estimant que la vraie direction d’acteurs se jouait au moment où le metteur en scène choisissait tel ou tel comédien. J’ai tourné deux fois avec lui et j’en garde de très bons souvenirs. Ce sont d’ailleurs les seules fois où j’ai eu un film en présentation à Cannes, à presque quarante ans de différence : Stavisky en 1974 et Vous n’avez encore rien vu en 2012, sur le mythe d’Orphée, d’après deux pièces de Jean Anouilh.

Difficile de ne pas évoquer votre illustre partenaire, Jean-Paul Belmondo, le Stavisky du titre, dont vous incarnez l’épouse…

Alors là, je dois avouer que le courant n’est pas passé entre nous ! Cela malgré ce que m’avait laissé entendre son ami, le maquilleur Charly Koubesserian, que je connaissais bien, et qui fut catastrophé du climat entre nous (Elle rit.) Jean-Paul était dans son époque "gonflette".

C’est-à-dire ?

Il avait quand même un rapport un peu misogyne avec les femmes, ce qui n’était pas ma tasse de thé. Il vivait alors avec une Italienne pulpeuse qui posait carrément ses seins sur la table (l’actrice Laura Antonelli, décédée en 2015, ndlr). Bref, disons qu’il aimait bien les femmes "coussins", pour ne pas dire autre chose. Or, moi, j’étais une fille très libre, pas du tout "poupée soumise". Pour tout dire, je devais être le type de femme qui lui faisait peur.

Pourtant, vous êtes devenus très amis par la suite…

Des années plus tard, nous nous sommes croisés à la sortie d’un théâtre. Je suis allée le voir et lui ai dit à quel point nous avions été cons sur Stavisky, que c’était dommage que ça n’ait pas accroché. Eh bien, à partir de ce jour-là, il est venu me voir à chaque fois que je jouais sur scène. Nous mangions souvent ensemble. Une grande amitié est née entre nous, qui ne s’est jamais démentie jusqu’à sa mort. On avait enfin passé l’âge de la séduction et des enfantillages !

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