Records, longévité, surmédiatisation… Le règne hors-norme d’Elisabeth II

« Je me suis engagée en toute sincérité à votre service, comme beaucoup d’entre vous se sont engagés au mien. Tout au long de ma vie et de tout mon cœur, je m’efforcerai d’être digne de votre confiance. » En 1953, la jeune Elisabeth, tout juste couronnée, promet dévouement et fidélité au peuple britannique et au Commonwealth. Un serment qu’elle tiendra près de soixante-dix ans. 

Avec la disparition de la reine d’Angleterre, décédée jeudi à Balmoral à l’âge de 96 ans, un an après son époux le prince consort Philip, une longue page se tourne, et ce n’est pas peu dire. Née en 1926 dans le quartier de l’ouest londonien de Mayfair, Elisabeth a accompagné le XXe siècle et ses profonds bouleversements, survolé le passage à l’an 2000 et marqué l’histoire de la monarchie par son incroyable longévité.

Le règne le plus long de l’histoire

La princesse Elisabeth accède au titre de reine le mardi 2 juin 1953 lors d’une cérémonie magistrale à l’abbaye de Westminster. Agée de 27 ans, elle arbore ce jour-là une couronne de près de deux kg sur la tête, et succède au trône d’Angleterre après son père George VI, décédé un an plus tôt après quinze ans de règne. Avant lui, son oncle Edouard VIII avait lui aussi brandi la couronne en 1936, pour finalement abdiquer quelques mois plus tard. Une souveraineté particulièrement brève qui tranche nettement avec celle de sa nièce, recordwoman des têtes couronnées.

Après un premier jubilé d’argent en 1977, Elisabeth II fête son jubilé d’or en 2002, cinquante ans après son sacre. Dix ans plus tard, elle décroche un jubilé de diamant et rejoint ainsi la reine Victoria, son arrière-arrière grand-mère, seule monarque britannique à atteindre les 60 ans de couronne. En 2015, elle dépasse officiellement son aïeule et devient la souveraine britannique ayant régné le plus longtemps. Et le 13 octobre 2016, après la mort du roi de Thaïlande Rama IX, Elisabeth accède au titre de monarque régnant depuis le plus longtemps et la plus âgée dans l’exercice de ses fonctions. Un palmarès qui aurait pu être complété par un jubilé de platine, prévu initiallement en 2022.

Le témoin d’un monde en plein bouleversement

Forcément, en près de 70 ans de règne, on a le temps d’en voir des choses. A commencer par un défilé de chefs d’Etat, dont 15 Premiers ministres britanniques (parmi lesquels Margaret Thatcher, première femme à accéder à cette fonction en 1979), 11 présidents français (et deux régimes républicains différents) ou encore 13 présidents américains. Elle a connu de son vivant la Seconde Guerre mondiale, la longue période de la guerre froide et la chute du mur de Berlin, et traversé en tant que reine de nombreux conflits qui ont touché tout particulièrement l’Angleterre : la guerre des Malouines en 1982, la guerre du Golfe en 1990… Elle a aussi assisté à l’entrée du Royaume-Uni dans l’Union Européenne en 1973, et sa sortie avec le Brexit en 2020. Et n’oublions pas la pandémie du Covid-19 et sa prise de position en faveur de la vaccination au Royaume-Uni.

Elle a aussi assisté aux premiers pas de l’homme dans l’espace, la naissance d’Internet, créé le premier site officiel de la Couronne en 1997 et envoyé son premier tweet en 2014. Du côté de la musique, Elisabeth II a été le témoin privilégié de l’ascension du rock anglais (dont certains artistes comme Paul McCartney ont été anoblis par elle), du punk (qui lui a même dédié une chanson), et des rave party. Enfin, le monde des corgis lui sera lui aussi à jamais redevable. Depuis son coup de foudre à l’adolescence pour ces drôles de chiens (mais très mignons), la reine en aurait accueilli près d’une trentaine selon Closer, et jusqu’à 13 en même temps.

Une longue histoire d’amour médiatique

Le règne d’Elisabeth II a aussi été marqué par une surmédiatisation de sa famille. Et cela commence dès la cérémonie de son couronnement en 1953, diffusé en direct à la télévision anglaise, tout comme dans cinq pays européens. Une première dans l’histoire du petit écran. Elle marque ainsi les débuts d’une longue tradition de retransmissions des cérémonies officielles de la famille royale, avec pour points d’orgue les mariages du prince Charles et de Lady Di (et son enterrement), puis de ses petits-fils William et Harry, qui ont marqué les téléspectateurs du monde entier. Véritable show-woman, on se souvient aussi de son apparition aux côtés de Daniel Craig/James Bond lors de la cérémonie des JO de Londres en 2012, de son spectaculaire (mais faux) saut en parachute, et son sens de l’humour bien à elle.

La reine d’Angleterre et les médias, c’est aussi une longue histoire d’amour (et de haine) avec la presse people et les tabloïds anglais. Soixante-dix ans de règne décortiqués dans leurs moindres détails : le choix de ses tenues et de ses chapeaux, sa démarche, ses expressions faciales, ses confidences dans les couloirs du palais… Une existence traquée, l’un des nombreux héritages qu’elle cède à sa mort à son successeur et ses nombreux descendants.

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