- Rompre avec un amour parce qu’on n’a plus confiance
- Privilégier son équilibre à sa vie amoureuse
- Se délester des codes de l’amour pour s’épanouir pleinement
- Vivre d’amis et d’eau fraîche ?
- De l’importance de se détacher du mythe du grand amour
“J’ai renoncé à l’amour. Et c’est l’une des meilleures décisions de ma vie.” C’est du moins ce que confie l’auteure américaine Laura Warrell dans un essai intime publié par le Huffington Post en décembre 2019.
Après un divorce à tout juste 30 ans, d’innombrables flirts sans suite et une série de relations décevantes auprès d’hommes allergiques à l’engagement, la quadragénaire décide de mettre fin à sa carrière amoureuse.
“Ces deux décennies pendant lesquelles on m’a fait comprendre ou dit clairement que je ne méritais pas d’être aimée m’ont ravagée”, écrit-elle. “J’ai passé des années à voir des thérapeutes, des coachs, à lire des livres de développement personnel ou des jeux de tarots. J’ai trop bu parfois, pleuré souvent. Je crois qu’il est temps de baisser le rideau”, confie celle qui a longtemps considéré une telle abdication comme le summum de la désolation. Et elle n’est pas la seule.
Rompre avec un amour parce qu’on n’a plus confiance
Selon la sexothérapeute et psychopraticienne Noëline Toribio, les femmes – et plus particulièrement les quinquagénaires – seraient de plus en plus nombreuses à renoncer à l’amour.
“Au cabinet, je remarque que les patientes n’ont plus confiance en l’amour. Elles ont le sentiment de ne pas être aimées à leur juste valeur, de ne pas être respectées », note la thérapeute basée à Versailles (78). Elle souligne que ce phénomène s’inscrit en parallèle d’une certaine libération de la parole autour de thématiques conjugales, comme la charge mentale féminine ou l’injonction à la vie à deux.
Et si la plupart des femmes renoncent, en effet, à l’amour par peur de souffrir, d’autres le font tout simplement pour ne pas bousculer un certain équilibre de vie qu’elles ont réussi à construire au fil de nombreuses années.
Privilégier son équilibre à sa vie amoureuse
C’est le cas de Virginie*, 59 ans, qui après un divorce douloureux et une relation de quelques années, ne veut plus entendre parler de relations amoureuses.
“Je veux plus m’embêter avec ça, je pense que j’ai assez donné !”, lance-t-elle en plaisantant. “Quand je me suis mariée, je pensais que ce serait pour la vie, mais il a préféré me quitter pour sa secrétaire. Du coup, maintenant, je veux pouvoir faire ce que je veux, quand je veux et ne plus avoir à me justifier. Et ça me convient très bien” résume-t-elle avec satisfaction. Désormais, elle privilégie ses relations amicales et familiales, notamment auprès de ses enfants et petits-enfants.
Je me trouve trop grosse, trop moche, pour oser tenter de retrouver quelqu’un. Mais la vérité, c’est que j’ai surtout peur d’être rejetée.
Pour d’autres femmes, c’est un profond manque de confiance en soi et le sentiment dévastateur de ne pas se sentir digne d’amour qui les empêchent de s’autoriser à vivre de nouvelles histoires. “Depuis mon divorce, je me suis construit une sorte de barrière émotionnelle”, raconte Clémence, 61 ans, directrice d’un théâtre parisien, dans un élan de vulnérabilité.
“Avant je m’en fichais mais maintenant je me trouve trop grosse, trop moche, trop ci ou trop ça pour oser tenter de retrouver quelqu’un. Je me trouve beaucoup d’excuses, alors que la vérité, c’est que j’ai surtout peur d’être rejetée”, poursuit celle qui décrit, par ailleurs, avoir un quotidien épanoui.
Se délester des codes de l’amour pour s’épanouir pleinement
Aux antipodes des préconçues misérabilistes qui continuent d’entretenir le cliché de la vieille fille ou de la veuve esseulée, nos témoins confient avoir largement gagné au change. Cette apparente solitude leur offrant liberté et indépendance, leur bonheur n’est plus conditionné à l’état de leurs sentiments ou ceux d’un.e autre.
Dans son essai, Laura Warrell mentionne ainsi des exemples de femmes inspirantes, qui ont fait du renoncement à l’amour le point de départ de nouvelles aventures de vie.
C’est une génération qui souhaite désormais s’affirmer, prendre soin d’elle, se placer en priorité dans leur vie et qui veut s’absoudre du patriarcat dans lequel elles ont été élevées.
“Je me souviens d’Yvette, qui, après avoir été quittée par son mari, a voyagé dans le monde entier. De Katrina qui a obtenu un diplôme du MIT à 48 ans. Ou encore de Wendy qui a rejoint les Peace Corps à la cinquantaine”, énumère l’écrivaine.
Un constat peu étonnant pour Noëline Toribio qui reçoit dans son cabinet des femmes qui ont le sentiment d’avoir trop donné, se rendant compte que leurs besoins et leur intégrité ont jusqu’à présent peu été pris en compte par leurs précédents partenaires.
“C’est une génération qui souhaite désormais s’affirmer, prendre soin d’elle, se placer en priorité dans leur vie et qui veut s’absoudre du patriarcat dans lequel elles ont été élevées et dans lequel elles ne se reconnaissent plus”, résume la psychologue, qui rappelle combien l’amour romantique tel qu’il est connu dans nos sociétés occidentales contemporaines reste, avant tout, un concept socialement construit.
Vivre d’amis et d’eau fraîche ?
Un constat que partage de nombreux chercheurs en sciences sociales, à l’image de l’anthropologue britannique Anna Machin, auteure du best-seller Why We Love : The New Science Behind Our Closest Relationships.
Nous n’avons pas besoin d’amour romantique dans nos vies. Il existe de nombreuses autres formes d’amour capables de répondre à nos besoins.
Dans son livre, la chercheuse à l’université d’Oxford estime que l’importance de l’amour romantique, tel qu’il est présenté dans la littérature, la musique ou encore le cinéma, reste largement surestimé et ce au détriment d’autres formes d’amour – familiales, parentales ou amicales.
« Nous n’avons pas besoin d’amour romantique dans nos vies. Il existe de nombreuses autres formes d’amour capables de répondre à nos besoins », affirme l’universitaire, citée notamment dans un article de BBC News. « Malheureusement, de nombreuses personnes consacrent trop de temps et d’énergie à la recherche d’un partenaire romantique et finissent par négliger d’autres types de relations », déplore-t-elle.
De l’importance de se détacher du mythe du grand amour
L’universitaire décrit le mythe du grand amour comme une simple histoire qui – inventée pour magnifier nos besoins de reproduction – ne devrait pas constituer l’alpha et l’oméga de nos existences.
Selon la spécialiste, l’importance que l’on y accorde, ou la manière dont on le manifeste résulte également de notre milieu social, de notre éducation ou encore de nos expériences personnelles, elles-mêmes culturellement construites.
“Mes parents ont divorcé quand j’étais adolescente… et j’ai toujours eu la sensation que ma mère était bien plus heureuse que pendant mes jeunes années. J’imagine que ça a dû jouer dans ma décision”, commente Virginie.
Pourtant notre psychologue reste un brin sceptique. “Jusqu’à aujourd’hui je n’ai jamais reçu ou rencontrer une personne se disant à 100% heureuse en étant célibataire. Le choix peut être effectivement assumé mais avec des épisodes de souffrance”, souligne-t-elle, précisant qu’un.e confident-e ou un thérapeute peut bien entendu aider à les traverser.
Un constat que confirme Laura Warrell à la fin de son essai. “Depuis que j’ai pris cette décision, il y a eu des bons et des mauvais jours. Ce qui était aussi le cas quand j’étais mariée ou quand je recherchais un nouveau partenaire”, souligne-t-elle précisant qu’elle espère tout de même rencontrer un jour “un mec bien”. “Mais peu importe si quelqu’un arrive dans ma vie ou non, je veux la vivre pleinement”, philosophe l’américaine.
*Les prénoms ont été changés
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