- « Decision To Leave » confronte un policier à une suspecte qui l’obsède.
- Park Chan-wook orchestre un jeu de chat et de souris à l’érotisme délicat.
- Il a obtenu le Prix de la mise en scène à Cannes pour cette histoire d’amour contrarié.
Pas étonnant de voir le jury cannois présidé par Vincent Lindon donner son prix de la mise en scène à Park Chan-wook pour Decision to Leave. Ce thriller vénéneux aux images sublimes aurait aussi mérité celui du scénario tant ce face-à-face entre une suspecte et un policier se révèle délectable.
« J’ai eu envie de jouer sur les codes du film noir » explique le réalisateur de Old Boy et Mademoiselle à 20 Minutes. Impossible de pas penser à Alfred Hitchcock avec cette intrigue où un enquêteur consciencieux (Park Hae-il) et une veuve pas vraiment triste (Tang Wei) se désirent sans se toucher autour du cadavre encore chaud d’un époux violent.
« Je parle d’amour contrarié dans Decision to Leave, insiste le réalisateur. J’ai voulu emmener le spectateur là où il ne pensait pas aller. Les personnages jouent l’un avec l’autre. Et moi je joue avec le public. » La manipulation est au centre de cette histoire diabolique où chacun prend tour à tour le pouvoir sur l’autre. Les sentiments passionnés affleurent au fur et à mesure d’un suspense sensuel.
La nourriture au centre du récit
« Dans la vraie vie, je mène une existence paisible, confie Park Chan-wook. Mes envies et pulsions, je les garde pour le cinéma. » Et son héros va en baver face à la jeune femme à la beauté envoûtante. « En deux heures, je dois résumer la vie de plusieurs personnages, explique-t-il. C’est pour cela que je prends plaisir à faire cuire mes héros en les confrontant à des situations intenables. »
La nourriture occupe une place prépondérante dans le cinéma de Park Chan-wook. On se souvient du poulpe dévoré vivant dans Old Boy. Là, ce sont un plateau de sushi et un hot dog qui illustrent l’évolution des sentiments du héros envers la femme qui l’obsède. « Le cinéma ne fait appel qu’à la vue et à l’ouïe, précise-t-il. Montrer des mets me permet de stimuler d’autres sens chez le spectateur qui peut en imaginer la consistance, le goût et l’odeur. »
Le fait que les héros ne se touchent jamais renforce ces sensations. « C’est sciemment que je n’ai pas mis de scène de sexe dans mon film, je voulais faire passer l’érotisme par d’autres biais, réaliser un vrai film pour adultes, où la passion ne s’exprimerait pas de façon trop évidente, » déclare le cinéaste. Ce parti pris fait qu’on déguste Decision To Leave comme un plat délicat dont on se délecte avec un plaisir qui n’est pas qu’intellectuel.
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