Début 2022, le Président de la République a annoncé une stratégie nationale de lutte contre l’endométriose. Et un nouveau test salivaire permet un diagnostic plus précoce.
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Ce sont deux excellentes nouvelles pour les 2,5 millions de Françaises qui souffrent d’endométriose, une maladie longtemps restée taboue… Et pour cause ! Celle-ci se manifeste principalement par des douleurs pendant les règles et les rapports sexuels, au point que certaines femmes renoncent à leur vie intime ou multiplient les arrêts de travail. L’endométriose est provoquée par la présence anormale d’endomètre (le tissu qui tapisse l’intérieur de l’utérus) en dehors de la cavité utérine. Normalement, il se développe tout au long du cycle menstruel et, en l’absence de grossesse, est naturellement éliminé au moment des règles. Sauf dans le cas d’une endométriose. « Le mécanisme est complexe mais, pour simplifier, on peut dire que des fragments de muqueuse utérine migrent dans la cavité abdominale en passant par les trompes. Ils se greffent alors sur le péritoine (tissu enveloppant les organes dans le ventre), les ovaires, les trompes, la vessie, l’intestin ou le rectum. Ces fragments saignent chaque mois pendant les règles en provoquant d’intenses douleurs spontanées, ou lors des rapports intimes. Ils peuvent aussi aboutir à la création de kystes sur les ovaires, ou bien de nodules au niveau du rectum ou de la vessie« , explique le Pr Philippe Descamps, chef du service de gynécologie-obstétrique au CHU d’Angers et coordinateur du centre expert EndoRef Angers. Une composante génétique est vraisemblable, et le rôle des polluants chimiques, particulièrement des perturbateurs endocriniens, fait l’objet actuellement d’études spécifiques.
Un diagnostic sans attendre
Aujourd’hui, le diagnostic d’endométriose n’est, en moyenne, posé que 7 ans après le début des symptômes. Un temps perdu inestimable avant de recevoir un traitement approprié. Le plan national de lutte contre la maladie prévoit donc de placer la recherche et l’innovation aux avant-postes, avec pour objectif une meilleure prise en charge des patientes. « A l’heure actuelle, on supprime les douleurs en supprimant les règles, soit avec une pilule en continu, soit avec un analogue de l’hormone LH-RH qui met en situation de ménopause artificielle réversible. Pour éviter les effets secondaires, comme des bouffées de chaleur, on ajoute une pilule contraceptive oestro-progestative. Parfois, il faut retirer les kystes ou nodules chirurgicalement, afin de réduire les souffrances. Chaque traitement se décide au cas par cas« , indique le Pr Descamps.
Un nouveau test salivaire sûr à 98%
Le deuxième axe de la stratégie gouvernementale consiste à garantir un diagnostic rapide et l’accès à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire. L’annonce, le 11 février dernier, de la mise au point d’un nouveau test pour détecter la maladie, l’Endotest, va dans ce sens. En collaboration avec cinq centres hospitaliers français, la start-up Ziwig a élaboré un test salivaire basé sur le séquençage haut débit et l’intelligence artificielle. « Pour la patiente, c’est très simple : il lui suffit de cracher dans un tube à essai et de le glisser dans une enveloppe destinée à un laboratoire spécialisé« , précise le Pr Descamps. Dans la salive, on a pu identifier 109 biomarqueurs impliqués dans l’endométriose, permettant une « signature » de la maladie. Plusieurs études publiées dans des revues prestigieuses ont mis en avant la fiabilité exceptionnelle du test, avec une sensibilité de 97 % et une performance diagnostique de plus de 98 %. « On est à l’aube d’une nouvelle ère concernant le dépistage de l’endométriose« , affirme-t-il. Les procédures sont en cours avec les autorités de santé pour obtenir un remboursement, afin que toutes les patientes puissent en bénéficier rapidement.
Une maladie enfin considérée
Troisième axe du plan de lutte : renforcer la formation des personnels de santé, mais aussi communiquer et informer le grand public sur cette pathologie. L’objectif est de créer un « réflexe endométriose » à l’école, à l’université, à la maison… et chez les médecins, afin que toutes les femmes puissent trouver une réponse à leurs douleurs et leur mal-être. Il faut arrêter de prétendre que souffrir pendant les règles est normal ! Bien sûr, toutes ne sont pas affectées de la même façon par la maladie. Certaines vont souffrir d’une forme dite « superficielle » ou, à l’inverse, dite « profonde », affectant le vagin, la vessie, etc., avec des kystes ovariens. Ces derniers sont à risque, le plus redouté étant l’infertilité. Pour avoir un bébé, beaucoup vont devoir mener un vrai parcours du combattant… « Aujourd’hui, on a tendance à proposer d’emblée une assistance médicale à la procréation (AMP) et non une chirurgie de l’endométriose. Or, depuis une dizaine d’années, on s’aperçoit que les ovocytes obtenus par FIV ne sont pas altérés, contrairement à ceux produits naturellement : du coup, les résultats des FIV sont tout aussi bons chez ces patientes que chez les femmes du même âge qui ne souffrent pas de cette pathologie« , souligne le Pr Dominique de Ziegler, gynécologue-obstétricien, spécialiste en AMP à l’hôpital Foch, à Suresnes.
La recherche scientifique mise en avant
Sous le pilotage des ministère de la Recherche et de la Santé, l’Inserm va mettre en place un programme doté de plus de 20 millions d’euros sur 5 ans, regroupant les meilleurs chercheurs de toutes les disciplines impliquées dans l’endométriose. Des campagnes de grande ampleur verront également le jour, afin de faire connaître la maladie et faciliter son dépistage.
L’engagement des associations de patientes
Deux associations de patientes sont agréées par le ministère de la Santé pour représenter les usagers du système de santé : EndoFrance et ENDOmind. Elles ont participé aux séances de travail ayant abouti à la stratégie nationale et ont pu y exposer les difficultés rencontrées par les patientes. Elles font aussi partie du comité de pilotage des filières de soins. Ces associations sont là pour orienter les femmes vers des spécialistes de la maladie, les soutenir et les informer. Elles lèvent des fonds pour la recherche et organisent de nombreux événements. Pour les contacter : www.endofrance.org et www.endomind.org.
L’éclairage de l’expert
Quels sont les objectifs de ces nouvelles filières de soins dédiées ?
Chaque région va devoir identifier au moins un centre de référence et d’expertise, afin de garantir une prise en charge globale, personnalisée et performante par des spécialistes de l’endométriose. Il s’agit d’améliorer l’offre de soins sur tout le territoire, de former des professionnels de santé, d’organiser le diagnostic afin qu’il soit posé plus rapidement et, bien sûr, de soigner de manière optimale. Ce dernier point sera rendu possible grâce à un maillage territorial permettant aux professionnels de santé de proximité, par exemple en ville, d’orienter les patientes aux formes les plus complexes d’endométriose vers des centres de référence et d’expertise. Beaucoup existent déjà. La mise en place de ces filières dédiées et la labellisation de ces centres par les agences régionales de santé (ARS) devraient rapidement améliorer l’accès aux soins, ainsi que la prise en charge des patientes.
Pr Jean-Marc Ayoubi, chef du service de gynécologieobstétrique et du service d’AMP de l’hôpital Foch, à Suresnes.
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“C’est dur d’avoir une vie sociale”
J’ai commencé à avoir de grosses douleurs avant mes premières règles, à 12 ans, mais c’est vers l’âge de 17 ans que la situation est devenue vraiment insoutenable, avec des ballonnements incessants, des douleurs pelviennes atroces pendant et en dehors de mes règles, des nausées et des diarrhées.
Mon diagnostic : A l’âge de 19 ans, j’en ai eu assez et j’ai décidé de consulter un gynécologue, qui a décelé un kyste de 8 centimètres sur mon ovaire droit. Trois mois plus tard, j’ai été opérée et c’est dans la salle de réveil que le chirurgien m’a annoncé la couleur : j’étais atteinte d’endométriose.
Je prends une pilule en continu pour arrêter complètement mes règles mais j’ai encore de temps en temps des petits saignements. Depuis, j’ai des gros problèmes de vertiges et la nausée tous les matins. Je suis ballonnée pratiquement tous les jours, même avec un simple verre d’eau. Il peut arriver que mon corps entier gonfle et que j’ai des bouffées de chaleur même si c’est plus rare. J’ai aussi un mauvais système digestif qui m’empêche d’aller à la selle aussi souvent qu’un humain “normal”. Et quand c’est le cas, c’est un enfer à cause de la douleur. J’ai l’impression mes symptômes se manifestent de façon assez aléatoire. On parle souvent du rôle de l’alimentation pour aider à les soulager les symptômes mais j’ai modifié la mienne et je ne remarque aucun changement. Résultat : c’est dur d’avoir une vie sociale, surtout étant étudiante qui vient d’emménager en France pour poursuivre ses études et ne connaître personne ici.
Mes solutions : Mon copain qui est avec moi depuis la première opération et qui me tient la main encore aujourd’hui pour me soutenir dans cette aventure de toute une vie. A voir de la compagnie et quelqu’un sur qui on peut compter quand on ne peut même pas se lever est un vrai soulagement et je le remercie tous les jours. Mes parents, aussi, même si aujourd’hui nous ne sommes pas dans le même pays. Je sais qu’ils sont toujours avec moi et qu’ils me soutiennent du mieux qu’ils peuvent. Viennent ensuite mes anti-inflammatoires qui aident un peu à calmer mes crises, mon thé au gingembre, ma bouillotte, de grosses chaussettes pendant l’hiver, ainsi qu’on bon film ou un bon livre.
Mes conseils aux autres femmes : Toujours écouter votre corps, peu importe ce que votre gynécologue vous dit. Si vous n’êtes pas d’accord avec le diagnostic car votre corps vous autre chose, allez voir un autre médecin jusqu’à ce que quelqu’un entende votre douleur. J’ai eu de la chance, mon gynécologue était très à l’écoute de ma douleur et m’a bien suivie dès le début. Je souhaite à toutes les femmes de pouvoir trouver un médecin de ce genre. Ensuite, certes il faut être forte, mais il ne faut pas non plus tout porter sur soi. Vous avez votre famille, vos amis, votre partenaire ou encore votre animal de compagnie vers qui vous pouvez vous tourner quand ça ne va pas. C’est le genre de maladie qui peut vous faire vous sentir très seule et vous faire perdre beaucoup de personnes de votre entourage. La maladie en elle-même est déjà assez dure à vivre comme ça, vous n’avez pas besoin de vivre la rupture d’une relation avec un proche qui ne veut pas comprendre votre douleur en plus de cela. Choisissez donc bien votre entourage et les personnes sur qui vous pouvez compter : dans les moments durs vous saurez d’avance vers qui vous tourner si besoin. Ayez toujours du gingembre frais chez vous des serviettes hygiéniques dans toutes vos affaires, des anti-douleurs à portée de main et un peu de chocolat dans le coin pour se faire plaisir. Vous pouvez aussi commencer à faire du yoga quand vous avez le temps pour respirer un peu et penser à autre chose.
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