La psychose est la maladie psychiatrique par excellence, sous laquelle nous retrouvons notamment la schizophrénie. Définition, symptômes, diagnostic et traitement avec le psychiatre Serban Cristescu.
Avec le Dr. Serban Cristescu, psychiatre
Restez informée
Qu’est-ce que la psychose ?
La psychose se caractérise par une perte de contact avec la réalité. “Pour comprendre la psychose, on peut l’opposer à la névrose, dont tout le monde souffre. Dans la névrose (aussi appelée normose par certains psychiatres), il n’y pas de perte de contact avec la réalité et la personne se rend compte, tandis que dans la psychose le contact est perdu et la personne ne sait pas qu’elle est dans un épisode psychotique,” explique le psychiatre.
La psychose modèle est la schizophrénie (c’est la forme extrême de la psychose). Elle est la forme de psychose la plus répandue dans la population, jusqu’à 1 à 2 %.
- Il y a des troubles psychotiques brefs dans des épisodes bipolaires.
- Dans la mélancolie il peut y avoir un délire, qui serait donc un trouble psychotique bref.
Elle est la maladie psychiatrique par excellence. “Bien qu’il n’y ait pas de consensus sur les chiffres, il y a 1 à 3 % de la population qui sont touchés à un moment de leur vie d’un trouble de type psychotique,” explique le Dr.
Quelle est la différence avec un épisode psychotique ?
La différence est seulement temporelle. L’épisode psychotique est par définition isolé, la psychose quant à elle, est une succession d’épisodes psychotiques plus ou moins rapprochés ayant un lien entre eux. « Au-delà de trois épisodes en moins de deux ans, on peut considérer que le patient fait une entrée dans la psychose,” détaille le Dr.Serban Cristescu.
“Un épisode psychotique isolé est aussi appelé bouffée délirante. Il peut durer de quelques heures, par exemple s’il est induit par des substances comme le cannabis, et une vie, avec une moyenne entre 2 semaines et 6 mois,” poursuit le spécialiste.
Quels sont les symptômes de la psychose ?
• Le symptôme cardinal est la perte de contact avec la réalité, la perception de la réalité est distordue. Ce qui perturbe le fonctionnement social et familial de la personne.
• Ces distorsions se manifestent d’abord par des hallucinations (dont la définition stricte est la perception sans objet à percevoir), dans cette maladie, elles sont essentiellement auditives : la personne entend des voix. La personne essaye d’abord de les passer sous silence, mais elles deviennent oppressantes et commencent à donner des ordres à la personne. Mais attention, beaucoup de personnes entendent des voix dans le monde et ne sont pourtant pas considérées psychotiques : leur quotidien n’est pas affecté, il n’y a pas de perte de contact avec la réalité.
• Le délire : la personne part de prémisses fausses et construit un échafaudage d’une néo-réalité, une réalité alternative qui n’appartient qu’à la personne qui la vit. “Selon la psychanalyse, ce pourrait être une tentative désespérée de guérison, de pouvoir continuer à fonctionner avec quelque chose d’incompréhensible : entendre des voix et n’avoir aucune explication est insupportable, si une histoire est montée autour (CIA, extraterrestre etc…) cela peut devenir plus vivable,” commente le psychiatre. Donc le délire aurait un sens et une fonction.
Dans le délire, on peut retrouver différents sous-types : la mégalomanie, la jalousie, la paranoïa… On observe alors trois grandes catégories de délires :
- Délire non systématisé : la schizophrénie, la personne est très peu comprise, salade de mots. Le délire est ici incohérent et polymorphe, il est dit hermétique ou énigmatique. La personne invente des mots.
- Délire systématisé : la structure paranoïaque. Les idées délirantes se sont organisées progressivement, par enrichissements successifs et sur un mode plus ou moins logique, de façon à former un tout relativement cohérent.
- Le délire en secteur : comme la jalousie, de grandeur, de spoliation. Le délire a un noyau de vérité mais le raisonnement est distordu.
Les symptômes particuliers à la schizophrénie
- L’isolement. Le schizophrène s’isole, se met à l’écart des autres.
- Les symptômes négatifs, en opposition aux symptômes positifs qui se voient, sont perçus par les autres (hallucinations, actes, discours incohérents), sont propres à la schizophrénie : le repli sur soi, l’isolement et la catatonie (la personne est complètement immobile).
Il faut souligner que la personne souffrant de psychose n’est pas violente, la proportion des personnes qui commettent un acte violent en psychiatrie est moins élevée que dans la population en général. En revanche, elles sont plus souvent victimes d’autrui.
D’autres symptômes possibles:
- Les symptômes cognitifs comme la difficulté d’être attentif, de se concentrer et de faire appel à la mémoire;
- les changements d’humeur;
- les pensées suicidaires ou se rapportant à la mort;
- l’abus de substances;
- les troubles du sommeil.
Les hormones féminines en cause dans la psychose puerpérale
“L’aspect hormonal intervient avec une certitude absolue dans les psychoses puerpérales, qui sont les psychoses du post-partum essentiellement mais aussi dans l’avant-partum,” explique le psychiatre.
La psychose puerpérale est différente du baby blues ou de la dépression du post-partum. La séparation avec l’enfant peut être si insupportable que ça déclenche le petit post-partum ou heureusement dans des cas plus rares une psychose puérpérale : la mère peut avoir des épisodes psychotiques durant lesquels elle peut voir son bébé comme un monstre, le fruit d’un viol… Il s’agit donc d’un trouble psychiatrique grave caractérisé par un état de confusion et de délire qui peut mettre en danger la mère, mais aussi son enfant.
Quelles sont les causes de la psychose ?
Il n’y a actuellement que des théories. Les théories psychanalytiques sont diverses et variées et ne sont plus consensuelles. L’hypothèse faisant le plus consensus est selon laquelle la maladie de la psychose est un trouble neurocognitif et organique lié aux circuits dopaminergiques.
Comment un épisode psychotique est-il diagnostiqué ?
S’il y a des symptômes positifs, le diagnostic se fait assez facilement.
Le problème est de diagnostiquer la psychose naissante, lorsqu’elle est encore dans une phase réversible. C’est une école de pensée française. “La psychose arrivée à l’état de délire, n’est hélas plus réversible en tant que risque de récidive, vous pouvez être en rémission complète, avoir une vie normale, travailler, avoir une vie sociale, des enfants mais vous avez toujours un risque de récidive avec une probabilité beaucoup plus forte que le reste de la population,” décrit le Dr. Serban Cristescu.
“Le tout début de la psychose de type schizophrénique est entre 12 ans et moins de 30 ans. Il y a une phase de pré-psychose où la maladie pourrait être encore réversible sans trop de médication,” poursuit le psychiatre. Mais les symptômes étant alors très discrets, il est très difficile de les déceler : le principal symptôme est la centralité, l’impression que tout se réfère à soi. Il n’y a que d’excellents praticiens habitués qui peuvent déceler une psychose naissante.
Comment traiter la psychose ?
Il faut être en psychothérapie, traiter par la parole, ce qui est valable pour toute la psychiatrie. La médicamentation ne remplace pas le contact humain.
Et comme le contact humain ne suffit pas… Il faut également mettre en place un traitement neuroleptique. Le premier médicament du genre découvert était la chlorpromazine, puis le Largactil. Les neuroleptiques ont pour effet de bloquer les symptômes positifs à forte dose et de lever un peu les symptômes négatifs à faible dose.
La première génération posait un problème d’effets secondaires, qui poussaient souvent les personnes à arrêter leur traitement : les effets extra-pyramidaux, comme ils sont dans la maladie de Parkinson mais réversibles. Donc des tremblements, une rigidité, une impatience.
“La nouvelle génération d’antipsychotiques n’ont pas de meilleurs effets mais on pensait qu’ils avaient moins d’effets secondaires.” Après plusieurs années, les spécialistes se sont finalement rendu compte qu’il y a un effet secondaire : le syndrome métabolique qui entraîne une hausse anormale du cholestérol, des triglycérides, ainsi qu’un pré-diabète et une prise de poids. Il y a malgré tout une meilleure tolérance et donc une meilleure observance.
Et la vie avec le traitement ?
Il y a un retour à la vie normale. Mais pas obligatoirement l’arrêt des signes de la psychose, il peut y avoir des hallucinations résiduelles, un délire à bas bruit mais qui n’empêchent pas la personne de vivre normalement ou quasi normalement.
Les rémissions peuvent être complètes. Cependant, le risque de récidive est plus important que dans le reste de la population. “Il y a la règle des tiers : on dit que 1/3 des épisodes psychotiques restent un épisode, un 2ème tiers évolue vers un va et vient avec une maladie psychotique (paranoïaque, schizophrénique, paraphrénique), et un dernier tiers qui reste dans la maladie,” commente le Dr.Serban Cristescu.
Merci au Dr. Serban Cristescu, psychiatre au CH Belair Charleville-Mézières Grand Est
Source: Lire L’Article Complet